Au risque de se répéter, on ne dira jamais assez que la préservation du matériel ferroviaire est un défi permanent. Entre les problèmes pour abriter le matériel, exponentiels selon l'écartement, les coûts de restauration, sans parler de remise en état de marche, et les contraintes techniques et financières pour le faire circuler, il faut avoir le feu sacré. Alors on pourrait s'étonner de voir préserver des véhicules moteurs ou remorqués qui faisaient partie encore hier des trains du quotidien. Voyager sur un chemin de fer touristique dans une caravelle (ou X4500 pour les presque non-initiés) peut ne pas paraître intéressant alors qu'on empruntait ces autorails pour aller au travail il y a encore 15 ans. De même, être remorqué par un locotracteur à voie de 60 cm des années 80 ne semble pas très historique comparé à une locomotive à vapeur de la première guerre mondiale.
Pour autant, préserver les véhicules d'aujourd'hui, n'est-ce pas préparer le patrimoine de demain ? Vous avez 3 heures, on ramasse les copies à la fin ! La réponse est oui, bien évidemment ! Il y a tellement d'exemples de type de matériel que l'on n'a pas sauvegardé par manque de moyens, de volonté, d'opportunité, ou que l'on a préféré laisser partir à la casse car les travaux de restauration paraissaient trop importants. Et pourtant, 50 ou 60 ans plus tard, ces mêmes travaux ne sont pas insurmontables, les moyens techniques et financiers ont évolué et on s'emploie de plus en plus, quand c'est possible, à pousser le niveau de restauration et d'authenticité. Si seulement on avait pu simplement les mettre à l'abri quelques décennies dans l'attente de jours meilleurs...
Alors on doit se réjouir aujourd'hui par exemple de la préservation de la BB 25673, une locomotive qui n'a "que 50 ans", par "l'Association de Sauvegarde d'une Locomotive de type BB 25500". L'association prend également sous son aile de la locomotive diesel BB 66467 jusqu'alors préservée par l'AGRIVAP. On peut aussi saluer le patient et impressionnant travail de remise à niveau réalisé par le Chemin de Fer de la Baie de Somme sur les voitures voyageurs à voie métrique récupérées auprès des Chemins de Fer Rhétiques en Suisse (une douzaine d'unités sur les dix dernières années). Des véhicules qui sillonnaient encore les belles montagnes suisses il y a quelques années à peine.
Rien n'est jamais gagné, mais lorsque les planètes sont alignées et les bonnes volontés rassemblées, il ne faut pas hésiter à préserver aujourd'hui ce qui peut l'être, pour ne rien regretter demain.

David Blondin